vendredi 1 août 2008

Siné cure (saison 1 épisode…)


Val qui rit, privé de Siné dessin de Maëster

A ma droite, Val, combien de divisions ? Une vingtaine de «personnalités » selon « Le Monde », organe central de la « bien pensance ». De qui s’agit-il ? Essentiellement de vieux cons reconvertis en néocons (sécurité, ordre moral…toute la bouillie bushiste recyclée par la dream team de Sarko !) dont le fleuron est l’ineffable Alexandre Adler. On peut se demander que sont venus faire les Badinter dans cette galère. Et Delanoé ? De quoi désespérer les socialistes…

A ma gauche, deux pétitions (dont la pure belge de l’ami Noël gloup gloup Godin) réunissent à ce jour plus de 10 000 signatures de partout ! Il n’y a pas que la place des Vosges, que diable ! Significatif de la césure (évitons le mot rupture, trop galvaudé par qui vous savez…) entre la pseudo intelligentsia qui passe allégrement d’une rive à l’autre et les refuzniks du prêt à penser formaté par une poignée d’happy few qui squattent les médias au service du pouvoir.

Amis grolandais, signez et faites signer la pétition de soutien à Siné ! Il n’y a pas de vacances pour la liberté d’expression…

http://www.soutenir-sine.org/petition/

R.D


Texte de Françis Kuntz paru sur le site Agoravox

Mes amis Philippe Val et Denis Robert

de Francis Kuntz

Dans son édito du 25 juin 2008, Philippe Val utilise une longue métaphore pour expliquer que Denis Robert est un journaliste qui prend ses fantasmes pour des réalités.

Un édito que j’ai lu avec d’autant plus d’intérêt que je connais Denis et Philippe Val pour avoir travaillé dans les mêmes journaux qu’eux à plus d’une dizaine d’années d’intervalles : Santiag, un magazine d’info animé par une bande de copains de Metz qui amena très vite Denis à travailler pour Libé, et la Grosse Bertha, ancêtre historique de la version actuelle de Charlie Hebdo, même si Val ne revendique guère ce passé, ce qu’on excusera facilement, la GB ayant été un brouillon très approximatif tiraillé entre les envies antagonistes de ses membres fondateurs.

Aujourd’hui, donc Val est la voix de Charlie. Et il dénonce Denis qui aurait bâclé son travail et accusé sans preuves. Qui ?

La chambre de compensation Clearstream dont deux livres et un documentaire de Denis Robert parlent longuement. Grâce au contact d’anciens employés de cette banque des banques luxembourgeoise, Denis a en effet eu accès à des listings de comptes troublants et enregistré des témoignages de méthodes utilisées par la banque, qui en opacifiait sa nature, la rendant ainsi vulnérable aux méchants internationaux de tous poils, des vulgaires escrocs en cols blancs aux terroristes, en passant par les multinationales qui vénèrent le dieu du secret bancaire. Voilà précisément ce que Denis Robert montrait du doigt dans ses livres et son reportage. Voilà contre quoi il mettait en garde.

Une horde de journalistes « très attachés à la déontologie », comme ils disent, s’est alors abattue sur lui, l’accusant d’agiter sans preuves, oubliant qu’en de pareils cas, c’est à la justice de prendre la suite du boulot.

Enfin, il me semble : jadis, un ami auteur m’avait demandé de témoigner en sa faveur à la suite d’une plainte d’un de ses confrères qui l’accusait de plagiat. Pour prouver son innocence, cet ami a dû réunir de multiples preuves et témoignages, dont le mien, qui attestaient que certaines idées lui appartenaient bien à des dates précises, publications datées, courriers ou mails du même métal à l’appui.

Philippe Val, qui ignore sans doute ce principe, n’est pas étonné que la justice luxembourgeoise et française n’aient jamais pu obtenir la justification des listings accusateurs par Clearstream.

Il n’est pas étonné qu’aucune confrontation sérieuse n’ait pu être faite entre les anciens employés de Clearstream et leurs responsables d’alors. Aucun étonnement non plus de sa part, lorsque cette banque luxembourgeoise a viré elle-même Lussy, l’ancien directeur et toute une partie de ses collaborateurs mis en cause.

Philippe Val n’est pas autrement surpris que la chambre de compensation, mais aussi une banque russe et une luxembourgeoise, aient envoyé à ce jour, quelques 300 huissiers au domicile de Denis Robert pour des poursuites judiciaires en diffamation ( trois cent, on aura bien lu. Il ne s’agit pas d’une coquille de l’imprimeur).

Pourtant, Philippe Val devrait savoir ce qu’est un procès en diffamation : c’est poursuivre quelqu’un qui, selon vous, accuse sans preuve. Grâce à cette loi scélérate, en France, on peut foutre un procès chaque semaine à Charlie Hebdo. Un exemple ? Un article faisant allusion au SMS de Sarko envoyé à Cécilia. Un SMS dont personne ne peut prouver légalement l’existence aujourd’hui. C’est cela un procès en diffamation : on ne prétend pas que vous avez tord, on dit que vous avez tord de vous occuper de ce qui ne vous regarde pas.

Je suis étonné qu’un grand homme de presse comme toi semble ignorer cela, mon cher Philippe !

Puisque j’en suis au tutoiement, sache que ta prise de position a d’autant plus retenu mon attention que ton édito est un peu bâclé. Par exemple, tu as oublié de dire qu’il y a quelques jours, Denis Robert, s’estimant vaincu par le harcèlement de procès en diffamation mené par Clearstream contre lui, a fait très clairement savoir qu’il n’aborderait plus jamais le sujet... Qu’on puisse désormais s’attaquer à lui sur ce terrain sans craindre de démenti de sa part a-t-il pu t’échapper ? A moins que ce ne soit ta verve littéraire qui soit un peu en berne, ces derniers temps.

Je le crains quand tu écris que « Denis Robert vient de perdre encore un procès », tu te trompes d’adverbe : ce n’est pas « encore », mais « exceptionnellement » qu’il fallait écrire. Je te rappelle en effet que Denis Robert a gagné ses procès contre Menatep (24) , Fortis (une dizaine) et Clearstream (voir le jugement de la Boîte noire sur le site des Arènes). Avec Clearstream, si on était au football je dirais même que le score est de parité 4 à 4. Balle au centre. DR a gagné les procès qu’on lui a intenté contre des itvs à l’Obs, au Point, chez Ardisson, et a perdu VSD et récemment Sud Ouest. Tout cela, par ailleurs, est en appel… Heureusement que Denis a décidé de lâcher prise faute d’argent, tu risquais un procès en diffamation !

Il est vrai que tu l’avoues sans manière : l’avocat de Charlie Hebdo est ton ami. Et quel avocat, puisqu’en plus de défendre les intérêts de Charlie Hebdo, il défend ceux de Clearstream ! Tu n’y vois aucun paradoxe et l’appelle même « mon ami Richard ». Denis Robert a soupçonné cette amitié d’avoir provoqué un mol entrain de ta part à le soutenir dans son combat, et ceci t’a beaucoup meurtri.

Je compatis en lisant la ligne de conduite de ton ami Richard que tu cites ( sans rire, cette fois ) : « Je suis spécialisé dans les affaires de presse. Je me bats, par passion, pour une information de qualité, élément essentiel de la démocratie. Dans le journalisme, la qualité a des critères : c’est le contraire de la calomnie, de l’utilisation démagogiques de fantasmes et de la création de boucs émissaires, même s’il s’agit d’une société luxembourgeoise. Ce n’est pas tant Denis Robert que j’ai fait condamner, mais une pratique journalistique, désormais coutumière sur Internet, où l’affirmation que la cause est bonne remplace la preuve et l’exactitude. Le mécanisme est simple, il repose sur ce postulat : la preuve que je dis vrai, c’est que des gens me croient. Et ils me croient d’autant plus qu’ils ont envie de me croire. Et ils ont de bonnes raisons pour cela : regardez toute l’injustice qu’il y a dans le monde ».

Ben voyons. Dommage que, sorti du contexte des enquêtes de justice qui se sont heurtées à Clearstream, et à travers elle, au puissant Luxembourg et sa machinerie financière, ce noble discours soit un peu hors sujet.

Malka parle de fantasmes, de la création de boucs émissaires. Le Luxembourg, comme la Suisse ou Jersey ou les ïles Caïman invitent au fantasme, en effet. Et une banque comme Clearstream constitue un parfait bouc émissaire. Malka eut pu rajouter « sans défense » pendant qu’il y était. Quelle dommage pour Denis que ce soit dans une de ces contrées qui font fantasmer et au sujet d’un bouc émissaire si vulnérable qu’il ait trouvé matière à enquêter !

De là, à comparer le travail de plusieurs années de Denis et ses informateurs aux rumeurs « journalistiques » d’Internet, il n’y a qu’un pas pour maître Malka. Un pas qu’il franchit avec un bel allant et Philippe Val qui n’a visiblement pas lu les livres de Denis Robert, mais connaît tout de l’affaire grâce au résumé objectif de son ami avocat.

Parfois, avouons le, Philippe sait aussi se faire un avis tout seul. Sur Weronika Zarachowicz, par exemple, qui a écrit un article dans Télérama pour annoncer que Denis Robert lâchait prise. Val nous livre la conclusion de celle qu’il appelle sa « consoeur », terme qui nous rappelle au passage que lui même ne se considère pas uniquement éditorialiste rigolo : « En Russie, écrit donc Zarachowicz , pour réduire les journalistes au silence, on envoie des tueurs à gages. Dans les vraies démocraties, on demande à la justice de faire son boulot. ». Et le journaliste éditorialiste maniant l’humour comme personne, ponctue la citation d’un « Saloperies de vraies démocraties » ironique. Car c’est vrai : de quoi se plaint Denis Robert ? On ne l’a pas liquidé à ce que je sache !

Fantasme, quand tu nous tient. L’ex saltimbanque qui brûla jadis les planches du music hall avec Patrick Font ne s’est visiblement pas débarrassé des siens. Rappelons qu’à l’époque, il vilipendait volontiers Pinochet, armé de sa seule guitare. A quelques milliers de kilomètres à peine du Chili, comme le soulignait Desproges en parlant des auteurs compositeurs engagés. Aujourd’hui encore, Philippe Val continue à tempêter contre les lointaines tyrannies mais reste un farouche défenseur de la démocratie. Là-bas, c’est mal et dangereux ; ici, faut pas déconner, on coupe pas les mains des poètes. Ben oui, c’est cool.

On a même le droit de dire du mal des confrères. De Zarachowicz donc, et de Robert, qui, ensemble, ont écrit jadis un livre d’entretiens avec Noam Chomsky, intellectuel controversé s’il en est, comme tu le rappelles si bien, mon cher Philippe. Une preuve imparable de la nature douteuse de ces deux journalistes et de leur coupable complicité qui fait que l’une défend bêtement l’autre sans savoir. Tout cela, bien sûr, n’est ni diffamatoire, ni calomnieux, dans la bouche de Philippe Val, puisque « la cause est bonne ».

« le mécanisme est simple, il repose sur ce postulat : la preuve que je dis vrai, les gens me croient » dit Malka, l’avocat et ami de Philippe.

Espérons pour Charlie Hebdo que ses lecteurs vont continuer à croire Val de longues années.

Kafka

(Francis Kuntz, en direct de Paris)

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